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Mengele et de Martin Bormann

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La vérité sur les identifications médico-légales du Dr Mengele et de Martin Bormann

 

Xavier Riaud

Sur la fin de ces deux hommes tout a été dit. Bormann se serait enfui avec l’avancée des Russes et serait mort on ne sait où. Il aurait émigré en Amérique du sud, etc. Mengele aurait gagné l’Amérique du sud et aurait été traqué en permanence par les agents du Mossad israélien. Conjectures et spéculations sont allées bon train. Voici en quelques mots la véritable histoire de ces deux hommes après la Seconde Guerre mondiale.


Dr Josef Mengele (1911-1979)

Josef Mengele 1 naît le 16 mars 1911. A Guenzburg, Josef est intelligent, raffiné et populaire. Il a trois frères. Ses parents, Karl et Walburga, l’envoie étudier la philosophie à Munich et la médecine à Francfort. En 1935, il soutient sa thèse qui traite des différences raciales dans la structure de la mâchoire inférieure.
En 1937, il rejoint le Parti nazi et la SS, en 1938. En 1942, il sert dans la 5ème division SS Wiking. Il est blessé sur le front russe et est déclaré inapte au service. Il se porte alors volontaire pour aller au camp d’Auschwitz.
Pendant ses 21 mois de présence dans ce camp, il participe aux sélections des convois vers les chambres à gaz. Il exécute sommairement avec son pistolet des détenus. Il s’intéresse à la gémellité et torture ses victimes avant de les faire tuer pour les autopsier. Il agit de même avec les tziganes atteints de noma. Il serait responsable de la mort d’environ 400 000 personnes.
Mengele quitte Auschwitz déguisé en soldat de l’infanterie allemande. Il est capturé en tant que prisonnier de guerre près de Munich, mais il est relâché par les Alliés.
En 1948, il décide de quitter l’Allemagne et de refaire sa vie ailleurs. L’Argentine est son choix de prédilection. Son père qui possède une entreprise de manufacture agricole, n’a pas de filiale là-bas, mais il y a de très bons contacts. C’est Josef qui devra les approfondir.
Mengele 2 s’envole pour l’Argentine, mais change régulièrement de région de peur d’être capturé.
Il divorce d’Irène Mengele en 1958 et épouse la veuve de son frère, Martha. Plus tard, elle et son fils le rejoignent en Argentine. Pendant 35 ans, malgré les traques qui s’organisent, il vit en bon père de famille, sous différentes identités.
Le Dr Pierre-François Puech m’a raconté qu’un temps, un homme avait été suspecté par le Mossad, les services secrets israéliens, d’être le docteur nazi. Pour cette raison, il était sous étroite surveillance. Mengele était connu pour avoir un diastème (un espace) entre les incisives supérieures. Des photographies ont été prises de l’homme soupçonné. Les clichés n’ont révélé aucun espace caractéristique entre ses dents. Le criminel SS était ailleurs 3.
Il vit au Paraguay et au Brésil jusqu’à sa mort en 1979. Le 7 février de cette année, il décide d’aller nager. Alors qu’il est dans l’océan, il a une attaque et coule à pic. Il est ramené à la surface. L’Ange de la Mort est décédé.
Les chasseurs de nazis découvrent une tombe au nom de « Wolfgang Gerhard » à Embu. Des ossements y sont retrouvés en 1985. L’anthropologue Clyde C. Snow 4 arrive à Sao Paulo ainsi que l’expert allemand Richard Helmer cet été-là. Les ossements ont été fracturés par ceux qui les ont déterrés. Malgré tout, l’équipe peut travailler. Les restes sont ceux d’un Caucasien droitier âgé de 60 à 70 ans. Il n’y a pas de radiographies dentaires et bien que les plombages de Mengele sont notés dans son dossier, aucune caractéristique particulière ne ressort. Snow et Helmer décident d’utiliser une technique de superposition du visage sur le crâne par vidéo. Ils marquent le crâne en 30 points de comparaison et réalisent la même opération sur une photo du défunt. Ils positionnent l’ensemble côte à côte près des caméras. Si tous les points s’alignent, alors l’identification est indiscutable. Après enregistrement, les images sont superposées et aboutissent à la conclusion que le crâne exhumé est bien celui du nazi.
Plus tard, des radiographies dentaires du médecin SS sont retrouvées et comparées aux dents sur le crâne, elles attestent sans aucun doute possible qu’il s’agit bien de celui de Mengele 5.
Sa famille reconnaîtra que ces ossements sont bien les siens. Malgré tout, le doute subsiste jusqu’en 1992 où un test ADN est réalisé sur les ossements et le fils du SS. Le rapport affirme en conclusion : « les restes sont bien ceux de Josef Mengele ».


Dr Josef Mengele 6, « l’Ange de la Mort »

Le diastème entre les incisives supérieures est ici parfaitement objectivable.
Dr Josef Mengele - Histoire de la médecine



Crâne de Wolfgang Gerhard 7
Crâne de Wolfgang Gerhard - Histoire de la médecine



Martin Bormann (1900-1945)

Martin Bormann 8 naît en 1900. Il est condamné pour complicité de meurtre en 1924. Un an plus tard, il rejoint la NSDAP 9 en Thuringe. En 1933, il est Reichsleiter de la NSDAP. De 1933 à 1941, il est le secrétaire personnel de Rudolf Hess. Après l’envol de ce dernier pour l’Angleterre, Bormann prend ses fonctions et sait très vite se rendre indispensable auprès de Hitler. Il en devient le conseiller personnel, l’équivalent de son bras droit. Tout passe par lui. Il est incontournable. Il intrigue et contrôle absolument tout pour ne livrer que des vérités servant ses intérêts.
Il est condamné à mort par contumace au procès des dirigeants nazis de Nuremberg.
Bormann 10 est un des derniers à quitter le bunker du Führer. Il s’en va peu de temps après minuit, le 2 mai. Il a dans sa poche, le testament de Hitler qu’il souhaite amener à l’Amiral Dönitz, légitimant ainsi sa prise de pouvoir à la tête de l’Etat. Dans son groupe, figurent également Arthur Axmann, leader des Jeunesses Hitlériennes, et le docteur Ludwig Stumpfegger, un des médecins de Hitler. Arrivés à la station de Friedrichstrasse, ils se dissimulent pour enlever leurs distinctions, sauf Bormann qui conserve son blouson en cuir noir. A la station Lerther, le groupe se sépare en deux. Bormann et Stumpfegger partent vers l’est, sur la Invalidenstrasse, vers la station Stettiner. Les autres vont dans l’autre sens. Après avoir croisé une patrouille russe, Axmann qui appartient au groupe de l’ouest, décide de rebrousser chemin et de rejoindre celui de l’est. Il rattrape les deux hommes très vite. De l’autre côté de la station Lerther, près d’un pont de chemin de fer, il les trouve étendus sur le dos. Morts. Sans marque visible de blessure.
Pendant plusieurs années, Axmann 11 a été le seul témoin de la mort de ses deux comparses. Il n’a jamais été accepté comme une preuve. Bormann est donc jugé et condamné à mort par contumace au procès de Nuremberg. De là, une polémique forte voit le jour ? Bormann ne serait pas mort, mais vivant en Amérique du Sud.
En 1972, Reidar Sognnaes décide d’établir une fiche descriptive reprenant les détails importants concernant les soins dentaires de Bormann. Grâce aux archives de guerre américaines, Sognnaes a déjà obtenu une copie du rapport des services secrets sur l’interrogatoire du dentiste de Hitler datant de novembre-décembre 1945. Blaschke n’a en effet pas été le dentiste seulement de Hitler, mais aussi de nombreuses personnalités du Parti nazi. Ce praticien SS a été interrogé sur la dentition de Bormann dont il a donné une description de mémoire. De ces données textuelles, Sognnaes tire un diagramme dans un rapport qu’il remet personnellement le 7 décembre 1972, au bureau éditorial du Journal de l’Association Dentaire Américaine. L’article ne sera publié qu’en février 1973.
Le 7 décembre 1972, des ouvriers creusent une tranchée pour une canalisation d’eau près de la station Lerther et retrouvent deux corps, un grand et un petit. Les coïncidences avec le lieu présumé du décès des deux protagonistes sont grandes. Une recherche de données ante-mortem est aussitôt engagée.
Après examen, Fritz Echtmann, le prothésiste de Blaschke, reconnaît un bridge en trois parties qu’il a lui-même fabriqué pour Bormann en 1942. Dans le même temps, la fiche de soins dentaires de Stumpfegger 12 est retrouvée. Toutes les annotations y apparaissant concordent avec la dentition du plus grand. Les détails écrits par plusieurs dentistes différents longtemps avant sa mort établisse avec certitude son identité. La dépouille du médecin est donc remise à sa famille qui l’enterre.
Mais, pour Bormann13, il semble n’exister aucune archive. Toutefois, la description de Blaschke et celle de Echtmann ne laisse aucun doute quant au nom du plus petit des corps. Mais, elles ne constituent pas des preuves légales. Le compte-rendu de l’examen des deux corps ainsi que des photographies sont publiées dans le Stern du 31 décembre 1972.
A sa lecture, Sognnaes qui réside à Los Angeles, ne masque pas sa surprise. Il part pour l’Allemagne d’août à septembre 1973. Après diverses investigations auprès de rescapés, il est autorisé à examiner le crâne qui a été placé sous scellés au tribunal fédéral de Munich. Il prend des photographies, des radiographies et des empreintes des mâchoires supérieure, et inférieure. De retour chez lui, il réalise des moulages. Il observe que le bridge en trois parties présente des petites incisions qui coïncident parfaitement avec des marques faites sur les dents inférieures de devant. La comparaison entre les éléments post-mortem et ceux fournis par Blaschke lui permette d’aboutir à la conclusion qu’il s’agit bien du crâne du n°2 nazi.
Les détails les plus flagrants ont été décrits dans le Journal de l’Association Dentaire Californienne de décembre 1974. Quels sont-ils ?
L’incisive supérieure droite est absente. Elle a été remplacée par un bridge en or s’étendant de l’incisive latérale droite à l’incisive centrale gauche. Des facettes en porcelaine ont été façonnées. Blaschke a décrit cette construction qui a été reconnue par Echtmann, son concepteur.
La troisième molaire inférieure droite n’était qu’à moitié sortie et présentait une grosse carie. Un pansement en ciment y avait été mis lors d’une des dernières consultations du défunt en 1945. La pulpe était exposée. Le dentiste en avait commencé le traitement canalaire. Le produit désinfectant placé sous le ciment dégageait une odeur très forte. Sognnaes 14 l’a senti 28 ans après et en a retrouvé toutes les caractéristiques.
La première molaire inférieure droite manquait. Un bridge en or la remplaçait de la seconde prémolaire à la seconde molaire. Blaschke a décrit encore une fois cette construction.
Après publication de l’article de Sognnaes, la mort de Bormann, le 2 mai 1945 à Berlin, n’a plus fait aucun doute.
Le 4 avril 1973, le procureur de Francfort 15 reconnaît officiellement la mort de Bormann, sur la base du travail de Sognnaes.
Une analyse ADN 16 est tout de même effectuée en 1999 qui ne fait que confirmer les conclusions de 1973.
Une dernière constatation a été faite parmi les dents des deux crânes. Des éclats de verre y ont été découverts. Il est donc presque certain que les deux hommes ne sont pas morts d’une balle dans le dos 17, comme il a été pensé pendant longtemps, mais plutôt qu’ils ont décidé de se donner la mort en croquant une capsule de cyanure.



Le crâne de Martin Bormann - Histoire de la médecine
Le crâne de Martin Bormann 18



 

1 Cf. http://www.Mengele.dk, Josef Mengele, The Angel of Death, pp. 1-5.

2 Cf. http://www.Mengele.dk, Josef Mengele, The Angel of Death, pp. 1-5.

3 Cf. Puech Pierre-François, communication personnelle, 2006.

4 Cf. Ramsland Katherine, « The Anthropologist meets the Angel of Death », in http://www.crimelibrary.com, 2005, pp. 1-3.

5 Cf. Ramsland Katherine, « The Anthropologist meets the Angel of Death », in http://www.crimelibrary.com, 2005, pp. 1-3.

6 Cf. U.S. Holocaust Memorial Museum, Washington D. C., 2003, © USHMM.

7 Collection privée – Droits réservés.

8 Cf. http://fr.wikipedia.org, Martin Bormann, pp. 1-3.

9 NSDAP: Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei: Parti ouvrier allemand national-socialiste.

Reichsleiter: cadre supérieur du Parti nazi, nommé par Hitler et exerçant les plus hautes responsabilités idéologiques et politiques.

10 Cf. Keiser-Nielsen Søren, Teeth that told, University Press, Odense, 1992, pp. 62-67.

11 Cf. Keiser-Nielsen Søren, Teeth that told, University Press, Odense, 1992, pp. 62-67.

12 Cf. Keiser-Nielsen Søren, Teeth that told, University Press, Odense, 1992, pp. 62-67.

13 Cf. Kirchhoff Wolfgang (Hrsg), Zahnmedizin und Faschismus, Verlag Arbeiterbewegung und Gesellschaftswissenschaft, Marburg, 1987, pp. 155-159.

14 Cf. Keiser-Nielsen Søren, Teeth that told, University Press, Odense, 1992, pp. 62-67.

15 Cf. http://www.rotten.com, Martin Bormann, p. 1.

16 Cf. http://fr.wikipedia.org, Martin Bormann, pp. 1-3.

17 Cf. http://fr.wikipedia.org, Martin Bormann, pp. 1-3.

18 Collection privée – Droits réservés.


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